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M. Thuriot. Je demande l'insertion au procèsverbal parce qu'il y a dans cette adresse des marques de dévouement et de patriotisme qu'on ne peut trop apprécier.

(L'Assemblée ordonne qu'il sera fait mention honorable de cette adresse et qu'elle sera insérée en son procès-verbal.)

M. Calvet, au nom du comité militaire, fait un rapport sur la plainte de la municipalité de Pontsur-Yonne qui a été traduite devant le tribunal du district de Sens, pour le payement du logement de la gendarmerie nationale. Il conclut au renvoi au pouvoir exécutif pour qu'il ait à faire payer la somme demandée par cette municipalité sur les fonds destinés au logement de la maréchaussée.

(L'Assemblée renvoie la demande de la municipalité du Pont-sur-Yonne au pouvoir exécutif pour qu'il fasse pourvoir au payement de cette dépense sur les fonds à ce destinés.)

M. Lequinio. Je demande que l'Assemblée ajourne à l'une des plus prochaines séances un rapport du comité d'Agriculture sur la prorogation accordée par les décrets du 18 août et 13 septembre 1791, pour la confection du canal de Juines et d'Essonne. C'est une entreprise d'où dépend l'existence de plusieurs milliers de citoyens.

(L'Assemblée décrète que ce rapport sera fait mardi soir).

M. Chéron-La-Bruyère. M. Boissy, trésorier de la société de bienfaisance, m'a fait parvenir une note pour réclamer des avances que lui faisait autrefois le gouvernement pour la délivrance des prisonniers débiteurs de mois de nourrice et pour la lingerie des prisons. C'est une société infiniment intéressante et respectable. Je fais la motion que cette réclamation soit renvoyée aux comités des secours publics et de l'extraordinaire des finances, réunis.

(L'Assemblée renvoie cette note aux comités des secours publics et de l'extraordinaire des finances, réunis.)

Un membre expose que plusieurs citoyens de la ville de Châlons-sur-Marne demandent que l'église de Saint-Eloi, ci-devant paroisse de cette ville, soit conservée comme oratoire.

(L'Assemblée renvoie cette proposition au comité de division.)

M. Lostalot. Les habitants des communes d'Arbleix et de Péchevin, de la ci-devant province de Béarn, n'ont encore été appelés à aucune assemblée primaire et ne sont compris, pour leurs impositions, sur le rôle d'aucun département. Ils demandent que ces deux communes soient incorporées dans le département des Basses-Pyrénées pour partager les charges de l'Etat et remplir leurs devoirs de citoyens. (Applaudissements.)

(L'Assemblée décrète le renvoi de cette pétition au comité de division et ordonne que le rapport lui en sera fait lundi prochain, après la lecture du procès-verbal.)

M. le Président. Voici une pétition de M. Pouard, nommé à la place de commissaire du roi près le tribunal de Lesparre. Il se plaint du refus des juges de ce tribunal de l'admettre en cette qualité et du jugement du tribunal de cassation qui a prononcé contre son admission.

L'Assemblée renvoie cette pétition au comité de législation.)

Un membre, au nom du comité de division: Par

un décret du 19 de ce mois, l'Assemblée a chargé son comité de division de lui donner la liste de tous les départements qui ont nommé leurs hauts jurés. Les départements de Paris et de la HauteLoire sont seuls en retard pour compléter la liste ordonnée par la loi du 15 mai 1791. Je propose, au nom du comité, que le pouvoir exécutif soit chargé d'écrire à ces deux départements pour les presser de faire les diligences nécessaires pour faire parvenir aux archives nationales les procès-verbaux de nomination de leurs hauts jurés. (L'Assemblée adopte cette proposition.)

Un membre expose que le département des Landes réclame une décision de l'Assemblée sur l'arrestation de 86 recrues pour le service espagnol, jetées par un naufrage sur les côtes de Bayonne. Il ajoute que le département n'a pas cru pouvoir prononcer sur les réclamations du consul d'Espagne pour la liberté de ces recrues, sans avoir consulté l'Assemblée nationale.

(L'Assemblée renvoie cette proposition au comité diplomatique qui en rendra compte demain.)

Un membre du comité de commerce prie l'Assemsemblée d'ajourner à un court délai un rapport de ce comité sur une pétition qui intéresse plusieurs milliers d'ouvriers du département de l'Aude et par laquelle ils sollicitent le redressement d'une erreur qui s'est glissée dans un article du tarif des droits d'entrée et qui porte sur les matières premières, tandis qu'il ne devait porter que sur les objets travaillés chez l'étranger.

M. Tarbé. Cette pétition intéresse aussi les manufacturiers de mon département. Je demande que le rapport soit ajourné à la séance de mardi prochain, au soir.

(L'Assemblée ajourne le rapport à la séance de mardi prochain, au soir.)

M. le Président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de décret du comité militaire sur le mode de recrutement des 51,000 hommes destinés au complet de l'armée (1).

M. Lacuée. Je demande la parole pour une motion d'ordre. Réfléchissant sur la séance que nous avons consumée ce matin en débats infructueux, j'ai cru m'apercevoir que nous avions devant nous un champ trop vaste pour parvenir au but que nous voulons atteindre. D'après cela, j'ai imaginé que si nous parlions en même temps de la cavalerie, de l'infanterie et de l'artillerie, corps tout à fait différents, qui demandent des éléments différents, peut-être ne remplirions-nous

ce que nous voulons. La marche tenue par comité militaire n'a pas paru généralement goûtée. Pour éviter une perte de temps considérable, je demanderai donc à l'Assemblée de vouloir bien déterminer si elle ne voudrait pas s'occuper d'abord de la manière de compléter l'artillerie, de passer ensuite à la cavalerie et de parvenir enfin à l'infanterie.

M. Charlier. On s'est perdu, ce matin, dans les divagations. On les aurait évitées si, au lieu de discuter sur la forme du recrutement, on avait décidé si on doit, ou non, recruter. Je m'explique a-t-on besoin de recrutement lorsqu'il y a en France 25 millions d'hommes réunis sous les armes?... (Rires et murmures dans l'Assemblée. Applaudissements dans les tribunes.)

(1) Voy. ci-dessus, séance du 21 janvier 1792, au matin, pages 554 et 560.

On m'a interrompu et l'on peut croire que j'exagère. Il est de fait qu'il existe 25 millions d'homes armés en France; car, sans contredit, il n'y a ni hommes, ni femmes, ni enfants, qui ne soient prêts à mourir pour la patrie. (Applaudissements dans les tribunes.) Vous devez considerer l'armée dans l'état où elle se trouve. Qu'est-ce que l'armée? C'est la France entière. On a voulu établir une distinction entre les troupes de ligne et les gardes nationales; et c'est un piège qu'on a tendu. Moi, je prétends que les troupes de ligne et les volontaires nationaux, unis de cœur par le même sentiment.composent l'armée française. (Applaudissements dans les tribunes.) Mais pourquoi a-t-on voulu établir cette distinction? C'est parce que, par la Constitution, le roi étant le chef suprême de l'armée, on ne veut pas qu'elle se compose de citoyens. L'armée pourtant sera composée de citoyens patriotes. Vous n'avez donc pas besoin de recrutement, parce que, le tocsin sonnant, la France entière est debout et armée. (Applaudissements dans les tribunes)

On a dit, ce matin, qu'on avait besoin de recruter au moins pour la cavalerie et pour l'artillerie, parce que le service demande un peu plus d'expérience; mais j'affirme que v us n'en avez pas besoin, parce que vous avez, dans l'infanterie, des soldats qui ne demanderont pas mieux que d'en sortir pour monter sur un cheval (Rires.) ou se livrer au service de l'artillerie. Il n'existe point de départements où des citoyens ne se soient retirés les larmes aux yeux, quand on les a réformés. Eh bien, demandez aux départements de mettre votre armée au complet avec des bataillons de ces volontaires nationaux; vous aurez bien vite une armée et vous n'aurez pas de risques à courir.

Je demande donc que l'Assemblée, avant de décider un mode de recrutement, fixe son opinion sur la question de savoir si l'armée sera recrutée. Vous avez, je le sais, besoin de la porter au complet; mais votre armée, c'est la France entière. (Applaudissements dans les tribunes.)

M. le Président. Nous sommes en présence de deux motions d'ordre. L'une de M. Lacuée, tendant à ce que l'Assemblée s'occupe d'abord du recrutement de l'artillerie, ensuite de la cavalerie et enfin de l'infanterie; l'autre, de M. Charlier Y a-t il lieu à recruter l'armée? Je vais consulter l'Assemblée.

Plusieurs membres demandent la question préalable sur les motions d'ordre.

D'autres membres demandent à combattre la question préalable.

M. Delacroix. Je demande que la discussion s'ouvre d'abord sur les trois questions suivantes : 1° Recrutera-t-on la cavalerie ? 2o Recrutera-t-on l'artillerie ? 3o Recrutera-t-on l'infanterie?

Une fois que ces trois bases auront été posées, on s'occupera du mode de recrutement.

M. Delmas. Il y a d'abord une question importante à décider, celle de savoir si on pourra recruter, pour compléter l'armée, parmi les bataillons des gardes nationales en activité, ou d'après des lois existantes. Un des preopinants a pensé qu'il ne fallait pas que l'armée de ligne fùi recrutee. Mais il me semble qu'il serait imprudent, impolitique de rendre un pareil décret... (Les huces d'une tribune couvrent la voix de l'orateur.)

Un membre: Monsieur le Président, rappelez à l'ordre ces insolents!

Voix dans la tribune: C'est vous qui êtes un insolent!

M. Delmas. Il faut recruter l'armée de ligne; mais il faut la recruter d'après les lois existantes et prohiber le recrutement parmi les volontaires nationaux en activité...

M. le Président. J'observe à l'orateur que ce n'est pas là la question.

Plusieurs membres observent que l'orateur est dans la question et demandent que la série des questions proposées par M. Delacroix soit mise aux voix.

D'autres membres: La question préalable!

M. Delcher. Avant de délibérer sur la question de savoir si l'armée sera mise au complet de guerre, il faut attendre d'avoir décidé s'il y aura guerre, parce qu'il ne faut pas que l'effet existe avant la cause. (Rires.)

(Le tumulte interrompt, pendant un certain temps, la délibération.)

M. le Président ramène le calme et rétablit les diverses propositions déjà faites.

Plusieurs membres demandent la question préalable sur la proposition de M. Lacuee et sur celle de M. Delacroix.

M. Thuriot. Je m'oppose à la question préalable, parce qu'on ne peut mettre en discussion ce qui est décid par un décret de l'Assemblée constituante qui a décrété que l'arm e serait mise au com let. Vous avez deux questions à décider : 1° Recrutera-t-on parmi les volontaires nationaux en activité, on s'en tiendra-t-on, pour recruter, aux anciennes lois ? 2o Le temps des engagements sera-t-il restreint, ou restera-t-il le même ? Je soutiens que ces questions sont préalables à toutes autres.

M. Merlin. Il manque 51,000 hommes. Toute la question se réduit à savoir comment nous les trouverons. Il faut chercher les moyens les plus prompts pour cela. Sans s'arrêter à de vaines discussions, qui font perdre à l'Assemblée un temps précieux, je demande qu'on passe à l'ordre du jour et qu'on s'occupe à chercher ces

moyens.

Plusieurs membres : L'ordre du jour sur toutes les motions!

(L'Assemblée passe à l'ordre du jour sur toutes les motions.)

(La discussion sur le projet de décret du recrutement est reprise.)

M. Delmas, Votre comité militaire, pressé par un décret et par les instances du ministre de la guerre, n'a pas eu le temps de méditer dans le calme cette grande question; cependant, j'ose dire que du résultat depend le succès de nos armes et peut être la liberté française.

Lorsque M. Dumas, rapporteur de ce comité, Vous a proposé un projet de décret, j'ai été surpris de ne pas y retrouver une disposition essentielle arrêtée à la grande majorité du comité. Après avoir examiné la question de savoir si T'on devait permettre aux troupes de ligne de se recruter dans les bataillons volontaires actuellement en activité, cete disposition a été rejetée le procès-verbal des séances du comité en fait foi. On ya arrêté, de plus, qu'un volontaire national actuellement en activité, ne pouvait pas, pendant cette campagne, contracter un

engagement dans les troupes de ligne. Cepen-compagnies de grenadiers des troupes de ligne dant, je n'ai pas retrouvé cette disposition dans ne puissent former une colonne capable de lutle projet du comité militaire, et j'avoue qu'il ter contre les grandes armées de l'empereur. Je est malheureux pour le comité, qui n'a pu que m'oppose donc à ce qu'on recrute pour la cavavous présenter un travail imparfait, de ne pas lerie dans les bataillons volontaires. retrouver, dans ce projet, une disposition qui prouve son patriotisme.

J'observe que M. Dumas vous a dit ce matin qu'il trouvait cette mesure infiniment injuste et qu'il ne concevait pas comment l'Assemblée nationale pourrait empêcher un citoyen de contracter un engagement dans un autre corps. Mais je répondrai à M. Dumas que l'engagement contracté par ce citoyen-soldat est assurément aussi sacré que l'engagement contracté par le soldatcitoyen; et certainement si, dans ce moment-ci, ce soldat-citoyen venait vous dire Moi, je veux servir de préférence dans la garde nationale, Vous lui répondriez Vous avez contracté un engagement; il faut que vous restiez dans le corps auquel vous êtes attaché. (Applaudissements.) Eh bien, on doit dire également au volontaire national Le salut de la patrie exige que vous restiez attaché au bataillon pour lequel vous vous êtes fait inscrire. Je rappelle en outre à l'Assemblee qu'elle a décrété, le 28 décembre dernier, que les volontaires nationaux ne pourraient se retirer, avant la fin de la campagne. Enfin, Messieurs, je crois que nous sommes tous d'accord sur la nécessité de ne pas permettre aux troupes de ligne de se recruter dans les gardes nationales. (Applaudissements.)

:

Je dis egalement qu'il serait dangereux, qu'il serait nuisible à la chose publique de permettre à un volontaire national, pendant cette campagne, de contracter un engagement dans les troupes de ligne. Il faut laisser cette formation volontaire intacte; et j'espère que l'Assemblée nationale ne se laissera pas influencer par des homines dont les intentions sont sans doute très pures, mais qui, par habitude, tiennent singulièrement au gouvernement militaire. (Applaudissements.) Si chacun de nous est, au fond de son cœur, représentant du peuple français, si nous sommes intimement convaincus qu'un gouvernement militaire ne peut convenir à notre Constitution, nous devons rejeter comme le comité la mesure qu'on nous propose. M. Jaucourt pense que le peu de temps qui nous reste pour faire nos préparatifs doit nous forcer à recruter l'armée de ligne parmi les volontaires nationaux. Moi, je crois, au contraire, qu'il vaudrait mieux, pour l'interêt public, fondre l'armée de ligne dans l'armée nationale, que de fondre l'armée nationale dans l'armée de ligne. (Vifs applaudissements. Mais ce jour n'est pas encore venu.

J'examine maintenant s'il convient de permettre à nos troupes à cheval de se recruter dans nos volontaires nationaux. J'admets qu'il faut absolument trouver un mode de recrutement pour les troupes à cheval; car, sans la cavalerie, on ne peut pas faire la guerre. Mais permettra-t-on aux troupes à cheval de se recruter parmi les volontaires nationaux? Messieurs, je m'opposerai encore à cette mesure; et pourquoi? Parce que si l'on prenait dans les bataillons de volontaires des jeunes gens pour les incorporer dans les troupes à cheval, on commencerait d'abord par degarnir les bataillons des plus beaux hommes, et ces hommes perdraient absolument l'instruction qu'ils ont acquise. Examinez, Messieurs, que dans chacun de ces bataillons il y a une compagnie de grenadiers, et je ne doute pas que ces compaguies amalgamées avec les

Eh bien, Messieurs, pour l'artillerie, ce sont les mêmes considérations, parce qu'il faut des hommes forts, des hommes robustes. J'aimerais mieux que dans ce moment où il faut 6,000 hommes pour la cavalerie et 4,000 pour l'artillerie, on les prît dans l'infanterie de ligne, mais non dans les grenadiers et les chasseurs, parce que, quand bien même vous prendriez 4 ou 5 hommes par compagnie, vous ne diminuez pas l'instruction de la compagnie. Je crois donc qu'on pourrait adopter cette mesure; et ensuite, pour se procurer l'excédent des hommes, vous pourriez adopter la mesure proposée par le comité militaire de charger les corps administratifs et les municipalités des chefs-lieux de canton d'ouvrir des registres pour recruter, soit pour l'artillerie, soit pour les troupes à cheval, et de donner à ces municipalités le droit de nommer des recruteurs auxquels ils auraient confiance.

En me résumant, je vais proposer des bases que vous renverrez, si vous les adoptez, au comité, pour en faire un projet de décret :

1o L'armée de ligne ne pourra se recruter dans les bataillons de volontaires nationaux actuellement en activité ;

2o Un volontaire national actuellement en activité, ne pourra contracter un engagement dans la ligne, soit dans une arme, soit dans une autre;

3o L'infanterie de ligne restera dans l'état actuel, roulant sur elle-même, sauf à se procurer des recrues conformément aux lois déjà faites; 4° Il sera fait une recrue pour les troupes à cheval, à 100 livres et pour quatre ans;

5o Pour l'artillerie, de même à 100 livres et pour quatre ans;

6o D'après ce décret, les engagements actuels ne seront plus que de trois ans, et l'on fondra dans l'artillerie une partie de l'infanterie de ligne;

7° Les auxiliaires seront admis de préférence à tous autres pour la cavalerie et l'artillerie, pourvu qu'ils aient la taille requise;

8° Les municipalités des chefs-lieux de canton seront tenues d'ouvrir un registre pour les enròlements des volontaires; elles seront autorisées à nommer des recruteurs, auxquels il sera accordé 10 livres par homme (Murmures.);

9o A la paix, les engagemen s seront réduits de moitié, et ceux qui auront été toujours présents sous les drapeaux à compter du 1er mars prochain, jouiront des droits de citoyen actif, et emporteront avec eux leur habillement, leur équipement et leurs armes. (Applaudissements.)

M. Dupuy-Montbrun et quelques autres membres parlent ensuite et proposent des vues différentes.

M. Aubert-Dubayet. Nous divaguons, nous nous perdons en questions étrangères. La véritable question est de trouver le meilleur mode possible de compléter l'armée. Le comité militaire, M. Hugau et un grand nombre de préopinants vous ont présenté leurs vues et vous ont fait entendre tout ce qu'il était possible de dire sur ce sujet. De tout cela, il a dù résulter une masse de lumières. Je crois que vous devez maintenant fermer la discussion et écouter la lecture de tous les projets de décret qu'on voudra vous

:

proposer alors l'Assemblée adoptera celui qu'elle jugera remplir le mieux son vou.

(L'Assemblée ferme la discussion et décide qu'elle entendra la lecture des divers projets de décret.)

Un membre: Je demande à relever un fait.
Plusieurs membres : L'ordre du jour!
(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

M. de Narbonne, ministre de la guerre. Je demande la parole.

M. le Président. M. le ministre de la guerre a la parole; mais je lui observe que ce n'est qu'à condition qu'il parlera sur des faits relatifs à son administration. Si, au contraire, il veut parler sur la question qu'on agite en ce moment, comme ce n'est pas objet de son administration, c'est à l'Assemblée seule qu'il appartient d'accorder la parole au ministre; je la consulterai.

M. de Narbonne, ministre de la guerre. Je vous prie, Monsieur le Président, de consulter l'Assemblée pour savoir si elle veut me permettre de lui dire deux ou trois choses relatives à la question qui est traitée en ce moment.

M. le Président. Je vais consulter l'Assemblée.

M. Basire. Il s'agit d'un fait.

Plnsieurs membres : A l'ordre! Monsieur Basire. M. Saladin. Je demande à répondre au ministre.

M. le Président. Monsieur Saladin, vous n'avez pas la parole.

M. Saladin insiste pour avoir la parole. M. le Président. Monsieur Saladin, je vous rappelle à l'ordre.

(Il s'élève de vives réclamations; plusieurs membres demandent la parole et parlent au milieu de l'agitation de l'Assemblée.)

M. Saladin. Je demande la parole contre M. le Président.

(Le calme se rétablit.)

M. le Président. J'ai refusé la parole à M. Saladin, parce que M. Basire l'avait demandée le premier et qu'il devait être entendu, si l'Assemblée jugeait à propos d'entendre quelqu'un de ses membres.

M. Basire. Je m'oppose à ce qu'on accorde la parole au ministre. Vous venez de fermer la discussion sur le fond. Il n'est permis à aucun membre de cette Assemblée de parler sur la question. Comment se ferait-il que le ministre aurait, dans ce moment, le droit de parler? II demande à parler sans doute dans le sens de la proposition qu'il a faite. Si vous lui accordez la parole, il faut de toute nécessité que vous rouvriez la discussion pour tous les membres de l'Assemblée. (Murmures dans l'Assemblée. plaudissements dans les tribunes.)

Plusieurs membres : Oui! oui!

Ap

M. Basire. D'ailleurs, en examinant cette proposition au fond, il ne doit pas être permis à un ministre, lorsqu'il ne parle pas sur son administration, de venir influencer les délibérations de l'Assemblée; et on a déjà eu très grand tort de permettre l'autre jour à M. Delessart de faire un très grand discours sur la nécessité et les avantages de la paix, chose qui n'était pas relative à son administration. Je demande la question préalable sur la motion d'accorder la

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M. Saladin. Le ministre de la guerre a proposé la question actuellement en discussion. Il n'a pas quitté le comité militaire; il a constamment assisté à la discussion... (Murmures.)

Un membre: Monsieur le Président, imposez silence aux ministériels! (Applaudissements dans les tribunes.)

M. Saladin. Si l'Assemblée ne veut pas m'entendre avec tranquillité, j'abandonne le droit d'énoncer mon opinion.

M. Viénot-Vaublanc. Il me semble que l'Assemblée doit avoir assez de confiance en son président, pour être persuadée qu'il rappellerait

ministre aux termes de la Constitution s'il s'en écartait. (Murmures.) C'est au Président à juger si le ministre ne donne que des renseignements relatifs à son administration, ou s'il entre dans la discussion. Alors, si le Président ne remplit pas son devoir, c'est contre lui qu'il faut demander la parole. Je crois donc que lorsque les ministres demandent la parole, M. le Président doit la leur accorder (Murmures.), sauf à les rappeler à l'ordre s'ils s'écartent de la Constitution. Cela convient plus à la dignité de l'Assemblée que de perdre beaucoup de temps à des discussions inutiles, surtout lorsque le ministre veut donner des renseignements. (Applaudissements dans les tribunes.) Je demande donc que la parole lui soit accordée.

M. Reboul. Je demande à concilier toutes les idées, par la lecture de quelques lignes de la Constitution (chap. III, sect. IV, art,10): « Les ministres seront entendus toutes les fois qu'ils le demanderont, sur les objets relatifs à leur administration, ou lorsqu'ils seront requis de donner des éclaircissements. Ils seront également entendus sur les objets étrangers à leur administration, quand l'Assemblée nationale leur accordera la parole. » On a dit que la discussion était fermée. Cela est faux, puisqu'elle est ouverte à qui voudra présenter un projet de décret. Je soutiens que vous pouvez, de même, entendre les observations ministérielles. (Murmures.)

M. Delacroix. Cette question ne serait point agitée en ce moment, si le comité de législation Vous avait fait son rapport sur une difficulté pareille déjà faite au ministre de la justice. Je soutiens que le ministre, comme dans les circonstances actuelles, n'est pas dans le cas prévu par la Constitution, c'est à l'Assemblée seule à lui accorder ou à lui refuser la parole. La Constitution accorde la parole aux ministres lorsqu'ils veulent parler sur les objets relatifs à leur administration. Mais où commence l'administration des ministres? C'est quand la loi est faite. (Applaudissements.) Si, quand la discussion est fermée, vous permettiez au ministre de parler, vous lui accorderiez plus que la Constitution n'a voulu lui accorder; car il aurait sur les membres de l'Assemblée un privilège qu'il ne doit pas avoir. (Applaudissements.) Par la seconde partie de l'article de la Constitution, les ministres peuvent aussi parler sur des objets étrangers à leur administration quand l'Assemblée leur accorde la parole. Il faut donc que le ministre de la guerre demande la parole sur un objet étranger à son administration pour que l'Assemblée la lui accorde. (Applaudissements dans les tribunes.)

Un membre: La question est simple et elle peut être résolue par un dilemme. Ou le ministre veut parler sur un objet de son administration, ou non. Dans le premier cas, la Constitution lui accorde la parole; dans le second cas, l'Assemblée doit être consultée pour savoir si elle l'accordera ou non. La question ainsi posée aurait été déjà décidée, si M. Saladin et M. Basire n'avaient pas divagué.

M. le Président. Je mets aux voix la question de savoir si le ministre de la guerre sera entendu.

(L'Assemblée décrète que le ministre de la guerre sera entendu.)

M. de Narbonne, ministre de la guerre. Personne ne rend un hommage plus vrai, plus sincère, plus mérité que moi au patriotisme des gardes nationales; et quand les jours de la paix reviendront, je crois devoir à mon titre de citoyen, titre que je ne séparerai jamais de celui de ministre du roi, de désirer fortement une diminution dans l'armée de ligne. D'après cette profession de foi, d'après ce serment, je crois que le ministre de la guerre peut parler, sans craindre qu'on lui reproche de la partialité.

Je conçois que les membres de l'Assemblée nationale, les plus jaloux de tout ce qui peut intéresser la liberté, voient avec inquiétude l'augmentation de l'armée de ligne: mais il importe qu'ils sachent que les généraux de nos armées, que tous les officiers, sur les opinions et sur les sentiments desquels il nous est permis de nous reposer, croient qu'on ne peut espérer des succès prompts, des succès faciles, qu'en opposant à des soldats disciplinés une redoutable armée de ligne. J'avais donc, Messieurs, énoncé cette opinion dans le rapport que j'ai eu l'honneur de faire à l'Assemblée. Je lui ai peint le véritable état de nos forces sous les couleurs de la vérité et de l'espérance; mais je dois à mon amour pour mon pays, à mon amour pour la liberté et l'égalité, de lui dire que 51,000 hommes sont nécessaires, non pas pour commencer la guerre, le courage et l'honneur n'attendent pas; mais 51,000 hommes de troupes de ligne de plus sont indispensables pour assurer des succès, pour ne pas nous engager dans une entreprise où l'on prodiguerait inutilement et témérairement le sang de beaucoup de citoyens courageux et dévoués. (Applaudissements.)

Plusieurs membres : Paix donc ! paix done! Un membre: Je demande la parole sur la proposition du ministre. (Non! non!)

MM. Dupuy-Montbrun, Merlin, Lacuée, Rouyer, Charlier, Aubert-Dubayet, Delacroix, Jaucourt, Delmas et Carnot-Feulins le jeune paraissent successivement à la tribune et lisent des projets de décret.

M. le Président. La parole est à M. LacombeSaint-Michel.

M. Lacombe-Saint-Michel. Il s'est déjà dit tant de belles choses que je n'ai plus rien à dire. Je me contente de demander la priorité pour le projet du comité.

Divers membres demandent la priorité pour quelques-uns des projets présentés.

M. Mathieu Dumas, rapporteur. Je demande que l'Assemblée renvoie au comité militaire les projets de MM. Jaucourt et Aubert-Dubayet avec celui qui a été proposé par le comité. (Murmures.)

1ro SÉRIE. T. XXXVII.

Plusieurs membres proposent de renvoyer tous les projets au comité militaire et d'y adjoindre les différents députés qui les ont présentés.

M. Roux-Fasillac. Je ne demande la priorité pour aucun projet de décret; ils me paraissent tous insuffisants. On peut les fondre ensemble et en former un tout complet. En attendant, je demande que l'Assemblée décrète comme principe que jamais, et sous aucun prétexte, l'infanterie de ligne ne pourra se recruter dans les bataillons de volontaires nationaux en activité de service. (Applaudissements.)

Plusieurs membres : L'armée entière! M. Roux-Fasillac. C'est votre avis, mais ce n'est pas le mien.

M. Lecointre. Aux voix le principe!

M. Mathieu Dumas, rapporteur. Je demande la parole pour éclaircir la question en deux mots et pour la poser d'une autre manière. (Murmures.)

MM. Lasource, Rouyer et quelques autres membres. Non! non! Fermez la díscussion, Monsieur le Président.

Plusieurs membres demandent à combattre le principe proposé par M. Roux-Fasillac.

M. Delmas. Je demande que le principe soit étendu à toutes les armes de l'armée de ligne.

M. Caminet. Je demande la division et qu'on mette aux voix les armes les unes après les autres.

M. Delacroix. Il n'y a pas plus de raison pour recruter une arme dans les bataillons de volontaires, que pour le défendre à une autre. Ainsi je demande, si l'on insiste sur la division, que M. le Président mette aux voix si l'infanterie pourra se recruter dans les bataillons des volontaires nationaux; si la cavalerie le pourra : enfin si l'artillerie le pourra. Dans le cas où la division ne serait pas appuyée, je consens qu'on pose le principe en thèse générale.

Plusieurs membres : La division est appuyée! (L'Assemblée décrète la division.)

M. le Président. Je mets aux voix si l'infanterie de ligne pourra se recruter dans les bataillons de volontaires nationaux en activité de service.

(L'Assemblée décrète que jamais, et sous aucun prétexte, l'infanterie de ligne ne pourra se recruter dans les bataillons de volontaires nationaux en activité de service. (Applaudissements.)

M. le Président. Je mets aux voix si les troupes à cheval pourront se recruter dans les bataillons de volontaires nationaux en activité de service.

(L'Assemblée décrète que jamais, et sous aucun prétexte, les troupes à cheval ne pourront se recruter dans les bataillons de volontaires nationaux en activité de service. (Applaudissements.)

M. le Président. Je mets aux voix si l'artillerie pourra compléter ou se recruter dans les bataillons de volontaires nationaux en activité de service.

(L'Assemblée décrète, après une épreuve douteuse, que l'artillerie pourra se compléter ou se recruter dans les bataillons de volontaires nationaux en activité de service.)

Plusieurs membres à l'extrémité gauche de la

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