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naturel d'en induire que les juges, frappés de la gravité de la matière, de la valeur et de l'étendue des objets prétendus détournés au grand préjudice de la nation, les aveux existants au procès, quoique rétractés, enfin un compte par simple évaluation que les gardes-magasins ont fourni à Brest, lequel les constituerait, suivant eux, débiteurs de 21,827 livres envers l'administration et créanciers, en reprises de 14,212 1. 12 s.; n'est-il pas, dís-je, plus présumable que ces juges n'ont pas voulu former les voies à une instruction nouvelle et plus régulière sur les lieux? c'est du moins ce qui m'a paru résulter clairement de cette sentence.

2o Les sieurs Gallet et Labadie se sont encore plaints d'avoir éprouvé le déni le plus formel de justice de la part du ministre de la marine, au mépris du jugement de Quimper, qui les déclare innocents, et ordonne qu'ils soient rétablis dans toutes leurs propriétés. Ils ont demandé que le ministre fût tenu d'exécuter ce jugement.

Si le jugement les avait effectivement déclarés innocents, je n'aurais pas balancé à l'exécuter; mais, je le répète, le tribunal ne les a déclarés ni coupables ni innocents; il n'a prononcé que sur la forme de la procédure, et je n'ai pas cru devoir préjuger le fond. D'ailleurs, indépendamment des accusations portées contre les sieurs Labadie et Gallet, ils ont encore un compte à rendre de leur gestion des magasins auxquels ils étaient préposés. Ils prétendent qu'ils redoivent environ 20,000 livres, et qu'ils en ont environ 40,000 à répéter; mais je ne pouvais adopter aveuglement leur assertion, compenser ainsi sur leur parole, et priver d'avance le Trésor public de tout moyen de recouvrement, si, par l'issue de la reddition de leurs comptes, ils se trouvent reliquataires.

Ils demandent l'exécution de la sentence de Quimper, et j'ai renoncé au bénéfice de l'appel de ce jugement qui n'était que de première instance. Je leur ai offert un passage gratuit dans l'Inde et une subsistance pour tout le temps qu'ils seront forcés d'y rester, soit pour une nouvelle procédure qui, si elle doit être suivie, ne peut l'être que dans l'Inde qui est le lieu du délit présumé, qui était le domicile des sieurs Labadie et Gallet, et où ce dernier a même encore sa famille et sa fortune, soit pour l'apurement de leur comptabilité qui ne peut être arrêté que dans l'Inde, comme ils l'ont constamment soutenu à Brest lorsqu'on leur demandait des états de leur gestion; et je me proposais d'y envoyer en même temps des expéditions des pièces de la procédure qui est déposée au greffe du tribunaf de Quimper. Je leur donne ainsi les moyens de parvenir à une justification encore indécise; c'est la seule voie qui me paraisse convenir à leurs intérêts, à leur délicatesse. S'ils sont innocents des délits qu'on leur a imputés, ils doivent désirer que leur justification soit claire et éclatante; et alors ils auront droit à des indemnités qu'ils ne peuvent encore réclamer, et qu'ils por tent arbitrairement à 50,000 livres aujourd'hui, quoiqu'ils eussent demandé à mon prédécesseur une somme trois fois plus forte.

Dans cet état, j'ai cru remplir exactement mes devoirs en m'occupant des moyens de faire arrêter des comptes déjà trop arriérés, et même de faire poursuivre, s'il y a lieu, des dilapidations dont l'objet a été présenté comme important. C'est en agissant d'une manière différente que j'aurais véritablement mérité d'être dénoncé, et compromis ma responsabilité. Mais si vous

pensez qu'il convienne d'arrêter entièrement la suite de cette affaire, je ne demande qu'à connaître votre décision, je m'empresserai de l'exécuter avec autant de promptitude que de zèle.

Plusieurs membres : Le renvoi au comité de marine!

(L'Assemblée renvoie le mémoire du ministre de la marine au comité de marine.)

M. le Président. La parole est à M. le ministre de la justice.

M. Duport, ministre de la justice. Messieurs, l'Assemblée constituante, par son décret du 9 janvier 1791, a ordonné qu'il serait procédé aux frais de la nation et sous la surveillance du ministre de la justice, à une édition complète et au nombre de 2,000 exemplaires, de tous les décrets rendus par elle « jusqu'à ce jour », acceptés ou sanctionnés par le roi; qu'un desdits exemplaires sera envoyé à tous les tribunaux de justice et bureaux de conciliation, de telle sorte qu'aucun de ces corps ne puisse à l'avenir prétexter de l'ignorance des décrets. Voulant me renfermer strictement dans les termes de la loi, je n'ai pas cru devoir donner des ordres pour que cette collection fût étendue au delà du 9 janvier 1791; mais j'observerai à l'Assemblée nationale que l'objet principal de cette collection ne serait qu'imparfaitement rempli, si elle ne renfermait la totalité des décrets de l'Assemblée nationale constituante. Son format et son authenticité la rendront sous tous les rapports très utile à tous les fonctionnaires publics auxquels elle est adressée en vertu de la loi; je prie donc l'Assemblée nationale de vouloir bien m'autoriser, par un décret, à faire continuer cette collection jusqu'au 30 septembre 1791.

M. Lasource. Je convertis en motion la proposition du ministre.

(L'Assemblée décrète que la collection des lois sera continuée jusqu'au 30 septembre 1791.)

M. Gérardin. Je demande, par amendement, l'envoi de cette collection aux juges de paix; car ils en ont un extrême besoin; je demande donc que les juges de paix reçoivent les lois.

Un membre: Dans ce moment, le comité des décrets s'occupe de cet objet avec le ministre, car si, d'un côté, il faut que les fonctionnaires les reçoivent, de l'autre, Messieurs, c'est une dépense très considérable à faire, il faut prendre fes

moyens nécessaires pour la diminuer s'il est possible. Dans ce moment, votre comité des décrets s'en occupe. Je demande le renvoi de la proposition de M. Gérardin au comité des décrets.

(L'Assemblée renvoie la proposition de M. Gérardin au comité des décrets.)

M. Duport, ministre de la justice. J'aurai l'honneur de proposer à l'Assemblée de vouloir bien s'occuper immédiatement d'une mesure que je crois de la plus grande utilité.

L'établissement du juré a dù commencer à dater d'hier, ainsi que le tribunal criminel. J'ai su que les anciens tribunaux, dans la présomption que les tribunaux criminels nouveaux s'occuperaient et pourraient vider la plupart des affaires qui étaient entre leurs mains, s'en étaient faiblement occupés, de manière qu'il y en a plusieurs en arrière. Il y a donc, dans ce moment, une foule d'affaires à terminer. Je crois qu'il serait extrêmement important que l'Assemblée nationale, voulût bien placer, d'une manière bien fixe et précise, la ligne de démarcation entre les af

faires criminelles susceptibles d'être jugées par les anciens tribunaux et suivant les anciennes formes, d'avec celles qui doivent être portées devant les nouveaux tribunaux. Je crois que cette mesure-là est extrêmement intéressante; je la crois très nécessaire; car, sans cela, je prévois une foule de difficultés qui vont naître, qui rendraient ma correspondance ennuyeuse et peut-être impossible, et qui d'ailleurs auraient le plus grand inconvénient, celui de me mettre dans le cas de prendre sur moi d'interpréter une loi; ce qui ne m'est pas permis par la Constitution. Je prierai donc l'Assemblée nationale de vouloir bien renvoyer cette question à son comité de législation pour lui faire un rapport dans le plus court délai, sur cet objet qui me paraît des plus urgents.

Un membre transforme en motion la proposition du ministre de la justice.

M. Lemontey. Je voulais rappeler que M. Robecourt (1) avait présenté les articles nécessaires pour marquer le passage des anciens tribunaux aux nouveaux. L'Assemblée avait renvoyé ces articles au comité de législation; le comité ne les a jamais joints au rapport qu'il vous a fait, et cependant l'objet était de nature à occuper nécessairement l'Assemblée avant la fin de l'année. Je demande donc que l'on joigne la discussion des articles de M. Robecourt à ceux que l'Assemblée a ajournés, je crois, à aujourd'hui ou à demain.

M. Bigot de Préameneu. Il y a cinq ou six jours que je fis la même observation que celle du ministre, et j'ai fait remettre, à M. le Président du comité de législation et à M. le rapporteur de cet objet, ce qui concerne la loi préparatoire sur les jurés. J'ai cru voir que M. Robecourt a présenté des articles de décret pour opérer la ligne de démarcation entre les affaires commencées, dont l'instruction doit être terminée par les jurés, et celles qui doivent être suivies par les anciens juges. Je suis persuadé que M. le rapporteur en fera un article additionnel au décret qui doit être discuté demain ou après-demain.

(L'Assemblée ordonne qu'il lui sera fait, demain matin, rapport de ces objets, ainsi que de ce qui concerne la haute cour nationale.)

M. Duport, ministre de la justice. J'ai à faire à l'Assemblée une proposition nécessitée par les circonstances, mais bien contraire à mes principes, car il s'agit d'une attribution. Les faux assignats se sont multipliés d'une manière effrayante Plusieurs affaires de ce genre sont pendantes devant plusieurs tribunaux de la capitale; elles ont presque entre elles une analogie, et il résulte des différentes instructions une sorte d'impossibilité de convaincre les prévenus et que, si elles étaient portées devant un seul tribunal, il y aurait plus de facilité pour atteindre et punir les coupables.

Messieurs, les présidents des tribunaux de Paris m'ont fait plusieurs fois des représentations sur cet article. Ils m'ont plusieurs fois engagé, au nom du bien public, à le porter devant l'Assemblée nationale. J'avoue que, plein de principes en cette matière, craignant toute dérogation à l'ordre, tranquille, fixe et immuable des lois, je me suis déterminé avec beaucoup de peine à faire à l'Assemblée nationale cette demande. Cependant, sur les instances réitérées de MM. les présidents, après avoir examiné avec la plus grande attention les considérations

(1) Voy. ci-dessus, séance du 19 décembre 1791 page 248.

qu'ils avaient soumises, j'ai pensé qu'il ne m'était pas possible de ne pas proposer à l'Assemblée nationale le renvoi devant un seul des tribunaux de Paris de toutes les affaires pendantes devant les différents tribunaux de Paris. Le tribunal des requêtes du palais est notamment saisi des principales affaires, de celles sur lesquelles il est le plus important de répandre la lumière. Ici l'intérêt public est tel qu'il me paraît faire violence aux principes, mais il me paraît absolument nécessaire et indispensable de saisir de ces affaires un tribunal d'attribution. J'ai fait la proposition à l'Assemblée nationale et je la prie de vouloir bien renvoyer ma proposition à son comité de législation, en lui observant que cela est d'autant plus instant que les rapporteurs dans plusieurs tribunaux, intimement convaincus de l'espèce de nécessité qu'il y avait à accorder telle attribution, ont ralenti l'instruction. Plusieurs membres Le renvoi au comité de législation!

M. Bigot de Préameneu. Si l'Assemblée est disposée à renvoyer au comité... (Oui! oui!) je ne dirai rien.

M. Reboul. Monsieur le Président, le comité des assignats et monnaies a un rapport à ce sujet ; je demande le renvoi aux comités des assignats et monnaies et de législation réunis.

(L'Assemblée renvoie la proposition du ministre de la justice aux comités des assignats et monnaies et de législation réunis.)

M. Duport, ministre de la justice. Je vais rendre compte à l'Assemblée d'un fait, qui, ce me semble, doit nécessiter une loi.

L'Assemblée nationale paraît avoir donné la plus grande étendue à la loi d'amnistie, et j'avoue que je suis complètement de son avis. Mais la généralité des expressions a donné lieu à beaucoup de difficultés, et voilà ce qui se présente dans un tribunal.

Une affaire avait pris sa source un peu avant la Révolution, dans le partage d'une commune; mais les mouvements de la Révolution ont donné plus d'activité à cette affaire et à l'esprit des personnes qu'elle intéressait. Il y a eu quelques violences et quelque fermentation. L'affaire a été portée au tribunal d'Amiens, où elle s'est instruite et où un jugement a été rendu. Plusieurs membres de l'Assemblée m'en ont parlé, et m'ont dit que cette affaire était dans le cas de l'amnistie. Je me suis fait rendre compte. J'ai écrit au commissaire du roi auprès du tribunal d'Amiens pour lui demander des éclaircissements. et j'ajoutais, en post-scriptum que, si les éclaircissements et les faits étaient tels qu'on me les avait présentés, je croyais que c'était le cas de l'application de la loi de l'amnistie.

Sur les éclaircissements qui me sont parvenus, et après l'examen très exact de cette affaire, j'ai persisté dans l'opinion contenue au post-scriptum de ma première lettre. Le tribunal d'Amiens n'a pas pensé comme moi, et, en conséquence, il a ordonné la continuation de la procédure et il y a eu des décrets rendus contre plusieurs accusés.

L'Assemblée voit sur-le-champ la difficulté qui résulte de cette espèce. Quel parti prendre? Il peut s'en suivre que des hommes que la loi aurait voulu comprendre dans l'amnistie, pourraient être punis de peines afflictives, même de la peine capitale. Je pense qu'il y a un très grand danger de remettre aux tribunaux l'appli

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cation de la loi d'amnistie. Je crois que l'objet est assez important pour attirer l'attention de l'Assemblée et pour la déterminer à renvoyer à son comité de législation à l'effet de lui présenter un mode qui soit capable de préserver d'une pareille erreur et de lui procurer un mode général d'exécution de la loi d'amnistie.

M. Saladin. J'ajouterai aux observations de M. le ministre de la justice, que le comité soit tenu d'en faire le rapport le plus tôt possible. (Oui! oui!)

(L'Assemblée renvoie les propositions du ministre de la justice au comité de législation, qui est chargé d'en faire incessamment le rapport.)

M. le Président règle l'ordre du jour de la séance de demain et recommande aux membres de l'Assemblée plus de diligence et plus d'exactitude.

(La séance est levée à trois heures et demie.)

ANNEXE

A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE DU LUNDI 2 JANVIER 1792.

PIECES JUSTIFICATIVES du mémoire (1) du ministre de la marine sur les inculpations dirigées contre lui par des citoyens de Rochefort et de Brest et sur lesquelles il a été fait un rapport par le comité de marine.

N° 1.

Pétition des citoyens actifs de la ville de Brest, à l'Assemblée nationale.

Législateurs,

Les citoyens de Brest, animés du zèle le plus pur pour le succès de la Révolution, vous dé

(1) Voy. ci-dessus ce mémoire, même séance, page 10.

(2)

noncent un abus, qui, par sa nature, peut causer les plus grands dangers à la patrie. L'Assemblée constituante a, par ses décrets des 29 avril et 1er mai derniers, donné une nouvelle organisation à la marine, et le ministre ne l'a point encore mise à exécution. Ce retard, que rien ne peut justifier, décourage les bons patriotes restés au service, enhardit les traîtres, qui l'ont quitté, pour courir aux frontières augmenter l'armée des émigrés. Le tableau ci-joint (2) vous fera connaître le nombre des officiers absents.

Législateurs, à vous est réservé le droit de réprimer un pareil oubli des lois; ordonnez au nouveau ministre de la marine de mettre à exécution les décrets rendus pour son département, et s'il ne pouvait de suite satisfaire à cet ordre, prescrivez-lui un temps; mais qu'au préalable, il. fixe pour le 15 novembre prochain, une revue générale dans tous les ports du royaume, et que ceux des officiers qui ne sont point à leur poste, fussent déchus de leur emploi, et remplacés aussitôt. Cet exemple de justice apprendra aux puissances étrangères, que nous ne voulons à la tête de nos armées que des officiers dignes de commander à des Français. Voilà, législateurs, ce que l'amour du bien public nous dicte. C'est à Vous à justifier notre confiance, en rappelant à tous les fonctionnaires, que lorsqu'un peuple se donne des lois, il est dans un état de crise qui ne permet à aucun citoyen d'abandonner ses fonctions. Les habitants de Brest, dévoués au maintien de la Constitution, vous jurent de plutôt mourir, que de souffrir qu'on y porte atteinte.

No II.

No 44. R. le 15 novembre 1791. (Le comité des pétitions a renvoyé au comité de marine, le 21 novembre 1791. Signé F. A. Antonelle, président.)

Pétition des citoyens de Brest tendant à demander

Etat de situation des officiers de la marine, en activité à la revue du 1er octobre 1791.

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Nota.Il est bon d'observer qu'avant la Révolution, dans le temps le plus calme, les revues se passaient tous les deux mois, mais comme à présent elles contrarieraient les opérations des méchants, on les passe tous les trois mois, et, moyennant le jour de présence, ils obtiennent la totalité de leurs appointements.

Depuis la dernière revue, il en est parti plus de la moitié sans congé; il est bon d'observer qu'il existe une lettre du ministre, qui leur enjoint à tous d'être à leur département respectif pour le 15 septembre, pour la nouvelle organisation qu'on ne se dispose point à mettre

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la suppression des traitements et appointements des officiers de la marine, absents sans congé, que l'on continue de payer, même à ceux actuellement émigrés.

Législateurs,

Pendant que vous vous occupez de l'examen de la conduite tenue par le ministère de la guerre, celui de la marine suit ses traces, et comme lui seconde de tout son pouvoir les vues et les projets de cette caste orgueilleuse ennemie de la liberté et de la Constitution.

Le ministre du Portail est en vain stimulé de toutes parts de mettre nos frontières en état de défense et d'armer nos gardes nationales; de telles mesures contrarieraient trop le plan formé de nous réasservir: animé du même zêle, le ministre de la marine, instruit que les citoyens de Brest avaient contribué de tous leurs moyens à l'armement des batteries de nos côtes, qu'il existait dans le port des vaisseaux en commission, prêts à servir au besoin, se hâte d'ordonner le désarmement de ces vaisseaux et des batteries, sous le spécieux prétexte de la conservation des effets.

Un tel ordre dans la circonstance où la patrie se trouve, peut bien se qualifier de trahison, c'est au moins un délit grave, et ce n'est pas le seul dont ce nouveau ministre de la marine se soit rendu coupable. Il y ajoute, avec moins de ménagement que ses prédécesseurs, la déprédation des fonds publics en faveur de sa caste chérie, les ci-devant nobles, servant dans la marine, auxquels il fait payer des appointements qu'ils méritaient de perdre pour cause d'émigration et d'absence illegitime.

Un sieur Bouexic, lieutenant de vaisseau, absent du service depuis près de 2 ans, vient d'obtenir par ordre de ce ministre, un rappel d'appointetements, de 19 mois 16 jours formant une somme de 2,604 1. 8 s. 11 d., sous le prétexte que cet officier avait été contraint par maladie, à la suite d'une campagne, de rester pendant 2 ans aux eaux de Bagnères.

Ce rappel d'appointements est d'autant plus injuste qu'on ne peut se dissimuler la fausseté des motifs allégués pour l'obtenir, puisqu'il est justifié par les registres des bureaux de la marine que lors du départ de cet officier, on ne lui accorda qu'un congé de 3 mois sans appointement et qu'un tel congé ne se délivre point à ceux qui désarment ou qui sont malades, parce qu'en pareil cas ils ne perdent jamais leurs appointements. Le ministre de la marine ne peut donc s'excuser d'avoir disposé aussi légèrement des fonds de la nation.

Le sieur d'Eschallard, major de la seconde division du corps des canonniers-matelots, absent du service depuis le 1er avril 1788, vient aussi d'obtenir de la faveur de ce ministre, un rappel d'appointements de 1,500 livres. Des congés avec appointements sont encore accordés à d'autres officiers qui, comme les sieurs Hector et Soulange, en jouissent en pays étrangers; ainsi des récompenses se trouvent prodiguées à ceux qui s'abstiennent de remplir leurs devoirs, et à ceux qui les trahissent ouvertement, tandis qu'on en est avare à l'égard des patriotes, dont le zèle et le courage pour le maintien de la Constitution ne se sont jamais ralentis.

Législateurs, tels sont les abus que nous avons résolu de vous dénoncer, dans la persuasion que vous ne souffrirez pas plus longtemps qu'une

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L'Assemblée constituante, en détruisant les restes de l'ancien régime, a, par ses décrets des 29 avril et 1er mai derniers, régénéré la marine. Cependant ces lois salutaires n'ont point été mises à exécution. Ce retard, que le ministre ne peut justifier, en détruisant l'espoir des braves marins restés à leur poste, fait naître des idées consolantes aux ennemis de la Révolution. L'extrait ci-joint (1) vous fera connaître l'état de situation des officiers absents.

Législateurs, les trames sans cesse ourdies contre la Constitution, les émigrations que le roi même n'a pu réprimer, tout vous impose d'ordonner au ministre de la marine de se conformer de suite aux lois relatives à son département; mais comme ce travail peut entraîner un temps considérable, il serait à désirer qu'il fixât provisoirement, pour le 30 du courant, une revue générale dans tous les ports du royaume; et que le remplacement des officiers absents sans congé, fût effectué de suite. Cet exemple de justice, en déconcertant les ennemis du dedans, prouvera à ceux du dehors, que nous ne voulons, à la tête de nos armées, que des héros de la liberté, et non des satellites du despotisme.

Voilà, législateurs, ce que notre patriotisme

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(1) Extrait de la revue du 1° au 31 décembre 1791. 147 officiers de tout grade, absents, dont 82, avec congé, et 65 sans congé. Nota. Il est essentiel d'observer que l'ordonnance de 1786 prescrivait de passer les revues tous les deux mois; et que maintenant, dans les vues, sans doute, de favoriser de plus en plus les intrigues de nos ennemis qui, par ce moyen, reçoivent la totalité de leurs appointements, moyennant quelques jours de présence, elles ne se passent plus que tous les trois mois.

Il est bon d'observer que le commandant de la marine de ce port, a envoyé à tous les officiers de son département, copie de la lettre du ministre qui leur prescrit d'y être rendus le 15 septembre, pour la nouvelle organisation; et que presqu'aucun n'y a répondu. On observera aussi que de deux majors du corps royal des canonniers-matelots, un seul est présent.

Il serait à désirer que la revue demandée fût applicable au département de la guerre.

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MM. De Peynier, officier général, n'était pas tenu à résidence.

Cuverville, capitaine de vaisseau, n'était
pas en tour de service, même après l'or-
donnance de 1786.
Baudran, idem.

Galles, idem, idem.
Kerguern, idem, idem.

Kergariou

Coeffier

Locmaria, idem, idem.

Breuil, idem.

Lamotte Groult, idem.
Belizal, idem.

Amé Lalaune, idem.
Senneville, idem.
Launay-Tromelin, idem.
Rochegude, idem.

Porlodec, sous-lieutenant.

Trogoff, capitaine de vaisseau; commande le Dugué-Trouin.

Huon cadet, major, commande l'Espérance. Mahé La Bourdonnaye, lieutenant; embarqué sur le Dugué-Trouin.

Ferrary, idem, commande la Moselle. Fontienne, idem, embarqué sur le Cha

meau.

Kerseaux, sous-lieutenant, embarqué sur le Jupiter.

Villeneuve Bruillac, idem, embarqué sur la Prudence.

Levasseur-Villeblanche, major, était destiné au commandement d'une frégate à Rochefort.

Labourdonnaye-Varennes, lieutenant, à l'Isle-de-France.

Rieux, lieutenant, à la Martinique.
Saint-Légier, idem, à l'Isle-de-France.
Savournin, idem, à la Guadeloupe.
Agon, idem, dans l'Inde.
Moucheron, idem, idem.

Cherval, idem, à l'Isle-de-France.
Duquesne, idem, à la Martinique.
Blois La Calande, idem; était attendu de
Rochefort.

Mottard, sous-lieutenant, employé à Cherbourg.

Trehouart, idem, à l'Isle-de-France.
Jouet La Thuillerie, idem, idem.
Bazire, idem, employé à Lorient.
Bidard de La Noé, idem, idem.
Baupte, idem, à la Martinique.
La Carrière, idem, employé à Lorient.
Dufay, idem, idem.

23 officiers qui ont demandé leur retraite.

22 officiers en congé ou malades.

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Kersaint aîné, capitaine de vaisseau, a de-
mandé sa retraite.
Capellis, idem, idem.
Verdun, idem, idem.

Médine, idem, idem.

Villeneuve-Cillart, idem, idem.

Pujet Bras, idem, idem.
Granchajn, idem, idem.
Laprevalaye, idem, idem.
Vintimille, idem, idem.

Kersauson Goasmelquin, idem, idem.
Lostanges, major, idem.

Nompère de Champagny, idem, était député à l'Assemblée constituante.

Chastenel Puységur, idem, a demandé sa retraite.

Kersaint, lieutenant, idem, idem.
D'Arclais, idem, idem.

Desmures, idem, idem.

Geslin Chateaufur, idem, idem.
Belzilm, idem, idem.

Livenne, idem, idem.

Le Groing La Romagère, idem, idem,
Penfentenyo, idem, idem.

Rolland, sous-lieutenant, idem.
Samuel Snoek, idem, idem.

Susannet, cadet, capitaine, a un congé.
Blachon, idem, a eu la permission d'aller

aux eaux.

Keroulas-Cohars, idem, est malade chez lui, près Brest.

Meherenc, major, a un congé jusqu'à la formation.

Leveyer, lieutenant. Son congé venait d'expirer, mais son état de maladie l'a empêché de rejoindre.

Keranneisant, idem, a un congé jusqu'à la formation.

Sancto-Domingo, idem, a un congé d'un an du 25 juillet 1791.

La Motte, idem, a un congé.
Guery, idem, idem.

Davigneau, idem, jusqu'à la formation. Coataudon, idem, est autorisé à rester chez lui, près Brest.

La Salle, idem, a un congé jusqu'à la formation.

Bernard, idem, a un congé.

Chateau-Neuf, idem, idem, jusqu'à la formation.

Franssures, idem, a permission de ne pas

joindre étant malade.

Hue L'Erondel, idem, a un congé. Beruelle, idem, a permission de ne pas joindre étant malade.

Viela, aîné, idem, a un congé jusqu'à la formation.

La Roche-Kerandraon, idem, a un congé. Kermellec, idem, a un congé jusqu'à la formation.

Clément, sous-lieutenant, a un congé.
Patrice Dowlin, idem, idem.

La Crosse, lieutenant, arrivé peu de jours après la revue.

Vaultier, idem, idem.
Furic, sous-lieutenant, idem.
Coquet, idem, idem.

Boubée, lieutenant.

Péronne, sous-lieutenant.

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