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Le 26 octobre dernier (1), il y a eu une dénonciation dirigée contre M. Valentin Mulot, qu'on a accusé à la barre d'avoir violé les droits les plus sacrés de la liberté; d'avoir été le principal moteur des troubles, des scènes de sang qui ont jeté les Avignonnais dans le désespoir et dans la consternation; d'avoir enfin abusé de ses pouvoirs pour consommer impunément toutes sortes de crimes.

Le 4 novembre suivant (2), il y a eu un rapport du comité des pétitions, et d'après lequel il à été décrété: 1° que M. Valentin Mulot serait mandé à la barre pour y rendre compte de sa conduite; 2° qu'il serait fait un message au roi pour le prévenir des demandes faites par les citoyens d'Avignon relativement à M. Le Scène, commissaire civil, dont ils désirent le rappel, et relativement encore à la directrice et aux employés des postes; 3° enfin, qu'on mettrait sous les yeux du roi les pièces où se trouvent contenus les faits et les motifs qui semblent solliciter le rappel des troupes de ligne actuellement dans le Comtat, et leur remplacement par d'autres et par des gardes nationales. Ces deux derniers articles ont été ajournés jusqu'à ce que M. Valentin Mulot ait été entendu.

Le 19 novembre dernier (3), M. Valentin Mulot s'est présenté à la barre; il y a été entendu. Eh bien depuis cette époque deux mois se sont écoulés, et les 2 articles ajournés sont restés sans exécution quelconque. Je demande donc que l'Assemblée nationale veuille prendre dans la plus haute considération l'affaire d'Avignon, qui pourra entraîner après elle les suites les plus désastreuses, indépendamment de toutes celles qui ont eu lieu jusqu'à ce jour; qu'elle ordonne à ses comités de pétition et de surveillance réunis de faire à ce sujet, sous le plus court délai, un rapport dont le résultat puisse mettre à portée l'Assemblée nationale de prendre des mesures sages, mais sévères, pour éteindre un feu qui ne semble couvert sous la cendre dans ce momentci, que pour porter plus sûrement l'incendie dans toutes les parties du Midi; résultat qui la mettrait également à portée de prononcer affirmativement sur l'innocence de M. Valentin Mulot.

Je prie donc l'Assemblée d'ajourner ce rapport à un jour fixe, et de ne point différer plus longtemps, parce que, pendant que nous procrastinons icí, on fait là-bas le procès à la révolution d'Avignon; l'on y persécute les vrais patriotes qui l'ont opérée. C'est une vérité dont l'Assemblée nationale ne pourra obtenir la confirmation que par des commissaires pris dans son sein; autrement elle sera constamment trompée, comme elle l'a toujours été jusqu'à ce moment-ci.

Plusieurs membres: Appuyé! appuyé!

M. Bréard. J'ai l'honneur de vous observer que vos comités des pétitions et de surveillance se sont réunis et, en conséquence de leur première délibération, ont demandé que les ministres leur rendissent compte de l'état des choses à Avignon. Les ministres se sont présentés, et j'ai vu avec peine qu'ils ne pouvaient nous rendre aucun compte, attendu que les commissaires civils ne leur en ont point rendu.

(1) Voy. Archives parlementaires, 1re série, t. XXXIV, séance du 26 octobre 1791, au soir, page 433.

(2) Voy. Archives parlementaires 1'e série, t. XXXIV, séance du 4 novembre 1791, page 638.

(3) Voy. Archives parlementaires, 1re série, t. XXXV, séance du 19 novembre 1791, au soir, page 169

Je demande à l'Assemblée de vouloir bien ajourner à la séance de mardi soir le rapport sur l'affaire d'Avignon.

Plusieurs membres: A mardi matin!

M. Mouysset. Il est très important de connaître la vérité sur l'affaire d'Avignon, mais je m'imagine que l'Assemblée ne veut pas s'exposer à prononcer sur cette affaire sans avoir des renseignements certains. Nous touchons au moment d'en avoir; il serait donc imprudent de prendre auparavant une décision. Je demande que le rapport soit différé jusqu'à ce que nous ayons les procédures instruítes à Avignon et que l'on passe à l'ordre du jour quant à présent sur la proposition d'envoyer des commissaires pris dans le sein de l'Assemblée.

(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

M. Lecointe-Puyraveau. Je demande la parole pour réclamer l'exécution de la Constitution; c'est vous en dire assez pour m'attirer votre attention. La Constitution a anéanti tous les préjugés; la Constitution dit encore qu'il n'y a plus ni vénalité, ni hérédité d'office. Vous savez, Messieurs, qu'il y avait auprès de différents tribunaux des personnes qui avaient des charges en vertu desquelles elles exerçaient des fonctions privilégiées; ces particuliers se donnaient le titre de greffiers de l'Ecritoire. Ils prétendaient avoir le droit exclusif de rédiger les procès-verbaux qui étaient faits par les experts. Ils soutiennent encore aujourd'hui qu'ils ont le même droit, et qu'un particulier qui est intéressé à faire une visite quelconque, ne peut pas se servir d'autres officiers publics. Ils s'appuient sur ce que les décrets sur le nouvel ordre judiciaire disent que les anciennes formes de la procédure seront suivies jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné. Je demande que ces officiers publics soient nominativement déclarés supprimés et que le comité de législation, auquel il est déjà parvenu des pièces concernant cet objet, vous fasse incessamment son rapport. (Appuyé! appuyé !)

(L'Assemblée renvoie la motion de M. LecointePuyraveau au comité de législation.)

M. Dorizy. Au renvoi qui vient d'être prononcé, je demande qu'on ajoute l'examen des arpenteurs et des architectes-jurés-experts qui se trouvent dans l'Almanach royal.

(L'Assemblée décrète la motion de M. Dorizy.)

Un membre: Messieurs, le nommé Duplessis, soldat au 84 régiment en garnison à Challans, ayant une fort belle écriture et ayant donné des preuves de civisme, voyant une place de commis vacante dans le directoire de Challans, demanda à occuper cette place par interim, jusqu'à ce qu'on eût nommé un commis. Le directoire, croyant encourager le soldat et flatter en même temps tous ses camarades, a donné cette place à ce soldat afin de l'attacher de plus en plus à la Constitution.

A peine a-t-il occupé cette place que son capitaine, le sieur de Saint-Preux, l'a mandé chez lui, et l'ayant en quelque sorte à ses pieds, car il l'a traité de la manière la plus indigne, lui a dit qu'il ne pouvait plus rester à Challans, dès qu'il ne voyait que des administrateurs, des juges de paix, enfin des hommes qui appartenaient entièrement à la Constitution; qu'il fallait qu'il quittât cette place et qu'il fût à Machecoul. Il lui promit qu'en arrivant à Machecoul, il serait accueilli avec bonté, que même il y trouverait de

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l'avancement et qu'on le placerait dans les gre- | vriers de tous états, de la province de Normandie, nadiers. Loin de trouver son avancement à Machecoul, le malheureux Duplessis n'y a trouvé qu'une prison où il est encore détenu, et c'est du fond de sa prison qu'il m'a fait passer plusieurs lettres que je demande à déposer sur le Bureau. Je demande en même temps que cette affaire soit renvoyée au comité militaire pour qu'il en fasse incessamment son rapport.

M. Merlin. On ne peut renvoyer au comité militaire. Il faut que le pouvoir exécutif dise d'abord ce qu'il en est, et c'est à lui que vous devez renvoyer. Si le pouvoir exécutif ne fait pas justice, c'est alors à l'Assemblée qu'on pourra s'adresser.

(L'Assemblée adopte la proposition de M. Merlin et décrète que le ministère de la guerre lui rendra compte incessamment de cette affaire.)

M. Jaucourt, secrétaire, donne lecture des lettres suivantes :

1° Lettre du directoire du département de la Somme, à laquelle est joint un arrêté de ce directoire, pour proroger provisoirement le délai fixé par la loi du 29 septembre sur l'établissement du juré; elle est ainsi conçue :

« Monsieur le Président,

Nous avons l'honneur de vous adresser une expédition de l'arrêté que les circonstances les plus impérieuses nous obligent de prendre, pour proroger provisoirement le délai fixé par la loi du 29 septembre sur l'établissement des jurés. Nous espérons que l'Assemblée nationale approuvera cet arrêté, ou que, par d'autres dispositions plus sages, elle nous donnera les moyens de former la première liste pour le juré de jugement et les autres listes qui doivent se succéder de 3 mois en 3 mois.

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Il serait peut-être à propos que les directoires de département fussent autorisés à choisir parmi les citoyens actifs pour la composition du juré d'accusation. Nous soumettons cette observation à l'Assemblée.

Nous sommes avec respect, etc...

Signé Les administrateurs composant le directoire du département de la Somme.

(L'Assemblée renvoie cette lettre et l'arrêté qui y est joint au comité de législation.)

2o Lettre de la municipalité de Saint-Servan qui se plaint de l'arrivée de plusieurs Français embauchés par les agents des émigrés dans les villes de Saint-Malo, Saint-Brieuc et Vannes, et qui sollicite la surveillance de l'Assemblée sur cet objet; cette lettre est ainsi conçue :

Monsieur le Président,

« Un citoyen est venu ce matin nous déclarer qu'il arrivait de l'ile de Jersey où il avait vu et parlé à un grand nombre de Français qui ont été embauchés par les gens des émigrés dans les villes de Saint-Malo, Saint-Brieuc et Vannes. On donne une paye de deux livres à chaque homme que le maître de bateaux passe à Jersey. Il donne quinze sous par jour à chaque homme jusqu'à ce qu'il y soit arrivé. Alors ils reçoivent 45 livres par mois et on les embarque pour rejoindre l'armée des princes.

"Il est arrivé dans cette île, depuis huit jours un bateau de Granville, portant 84 Français, ou

qui y avaient été embauchés. Il y a aussi des embaucheurs à Saint-Malo; nous n'en pouvons douter. Nous allons prendre tous les moyens nécessaires, de concert avec la municipalité de cette ville, pour prévenir cette manoeuvre. Nous vous prions, Monsieur, d'en faire part à l'Assemblée, afin qu'elle prenne les moyens les plus sages pour réprimer de pareils abus, qui sont d'autant plus dangereux dans cet instant de crise, qu'en affaiblissant nos forces, ils augmentent celles de nos ennemis. Nous croyons que le rétablissement des passeports pourrait les prévenir : c'est le vœu de nos citoyens.

« Nous sommes avec respect, etc.

« Signé Le maire et officiers municipaux. « DE SAINT-SERVAN. >>

Plusieurs membres : Mention honorable et renvoi au comité de surveillance!

(L'Assemblée décrète qu'il sera fait mention honorable de cette lettre en son procès-verbal et qu'elle sera renvoyée au comité de surveillance.)

M. le Président donne connaissance à l'Assemblée de deux mémoires présentés à l'Assemblée nationale, par M. d'Avesne, colonel de l'armée brabançonne, l'un sur les moyens d'améliorer la culture et l'emploi du chanvre, l'autre sur ceux d'augmenter le nombre et la qualité des chevaux en France.

(L'Assemblée ordonne qu'il sera fait mention honorable de l'hommage que lui fait M. d'Avesne, et que ces deux mémoires seront renvoyés aux comités d'agriculture et de commerce réunis.)

M. le Président. Je viens de recevoir une lettre adressée au comité ecclésiastique à Paris. Je consulte l'Assemblée sur ce que je dois faire. Plusieurs membres : Il faut la lire!

D'autres membres : Le renvoi au comité des domaines!

(L'Assemblée autorise M. le Président à décacheter cette lettre.)

M. le Président ouvre la lettre et instruit l'Assemblée qu'elle contient une pétition d'un cidevant religieux, qui demande qu'on paye aux prêtres ci-devant religieux-profès, de la Chartreuse d'Auray, le traitement qui leur est dû, et qu'on les laisse jouir en paix des petits meubles qu'ils réclament; enfin, qu'à cette pétition est joint un arrêté du directoire du département du Morbihan sur cet objet.

Plusieurs membres Le renvoi au comité des domaines !

M. Dorizy. Il n'y a lieu à aucun renvoi; il y a des lois faites; je demande le renvoi au pouvoir exécutif.

(L'Assemblée renvoie la pétition et l'arrêté au pouvoir exécutif.)

M. Deliars fait une motion sur l'ordre général des travaux de l'Assemblée; il s'exprime ainsi (1):

Messieurs, on n'a cessé de faire jusqu'à présent, sur l'ordre du jour en général, des propositions auxquelles nous avons constamment applaudi; tant il est vrai que nous désirons tous un ordre invariable sur ce point important!

Mais, en n'adoptant que des mesures partielles

(1) Bibliothèque nationale: Assemblée législative, Le 34, in-8°, n° 38.

et insuffisantes, nous sommes restés dans cet état pénible d'incohérence, d'incertitude et de désordre, qu'il faut enfin bannir pour jamais de nos délibérations.

Il ne suffit pas, Messieurs, de lire sur une af fiche en arrivant à chaque séance, quelles sont les matières qui doivent s'y traiter, pour être en état de les discuter et de les juger avec maturité : Vous avez, il est vrai, décrété dernièrement qu'à l'avenir l'ordre du jour serait proclamé et affiché dès la veille; mais, Messieurs, cette mesure est encore insuffisante, en ce que la mémoire la plus heureuse ne peut garder un souvenir de cette nature; et si, pour se garantir de l'oubli, chacun de vous se déterminait à aller, au lieu de l'affiche, la copier chaque jour, vous conviendrez que ce serait le motif d'un attroupement qui durerait en cet endroit pendant tout le cours de cette séance et produirait l'effet le plus insupportable.

Je propose donc, à cet égard, que l'ordre du jour du mercredi, par exemple, soit dressé le lundi et envoyé de suite à l'impression, pour faire partie de la distribution du mardi et ainsi successivement jusqu'au terme de notre session.

De cette manière, Messieurs, nous arriverons tous les jours ici, avec au moins 48 heures de réflexions sur nos matières, avec tous les projets de décrets imprimés sur icelles et avec cette maturité, qui seule peut nous assurer des décisions aussi promptes que solides; car, par ce moyen, nous garantirons nos débats, de cette foule d'idées primaires tellement inadmissibles, qu'elles soulèvent contre elles toute l'Assemblée, la force à les combattre de toutes parts avec la même immaturité et nous livrent à des discussions aussi tumultueuses qu'interminables.

Je ne crois pas, Messieurs, avoir besoin d'un plus grand nombre d'observations pour vous prouver la nécessité d'imprimer et distribuer à l'avenir l'ordre de chaque jour au moins 48 heures à l'avance; conséquemment, il ne me reste plus qu'à vous indiquer avec la même brièveté la manière de combiner nos travaux, pour leur donner une marche rapide et régulière.

Deux sortes d'objets occupent l'Assemblée : savoir les rapports de ses comités et la lecture des pétitions, lettres, adresses, comptes des ministres et autres autorités constituées.

Les rapports des comités sont les seules matières susceptibles d'être immédiatement discutées, pour devenir lois de l'Empire; et c'est alors que nous remplissons nos fonctions de législateurs.

A l'égard des lectures qui forment la seconde partie de nos travaux, elles ne sont suivies que de renvois aux comités correspondant à chaque objet et, par là, nous nous bornons au seul caractère de représentants de la nation conférant avec les représentés et recevant les comptes de leurs administrateurs.

Nos deux fonctions ainsi caractérisées, j'observe que leurs objets traités concurremment, se nuisent l'un à l'autre ; car, sans cesse nous abandonnons l'ordre du jour pour entendre des lectures qui lui sont étrangères; comme nous précipitons ces lectures, où nous en désirons la fin avec impatience, pour rentrer dans l'ordre du jour. De là la nécessité d'avoir des séances du soir pour réparer en quelque sorte le temps perdu et multiplier les lois en raison de l'abondance des matières. Mais les soirs sont consacrés aux travaux des comités; en sorte que des membres qui les composent se trouvent privés de leur droit de participer à tous les décrets, s'ils sui

vent exactement les délibérations de leurs comités ou qu'ils négligent ces fonctions secondaires s'ils donnent la préférence à celles des législateurs.

Remédiez, Messieurs, à des inconvénients aussi préjudiciables à la chose publique, en divisant vos deux espèces de travaux.

Consacrez vos séances du matin aux seuls rapports des comités et des membres qui, ayant des projets à proposer, se seront fait comprendre dans l'ordre du jour, et vos séances du soir, en tant que de besoin, aux seules lectures des pétitions, lettres, adresses, comptes des ministres et autres fonctionnaires publics.

Alors, nous nous trouverons tous également occupés, les uns à préparer les rapports nécessaires à la confection des lois et les autres à distribuer aux comités les matériaux nécessaires à la confection de nouveaux rapports.

Les comptes des ministres que vous recevrez à ces séances du soir, les pétitionnaires que vous y entendrez à la barre, les pétitions, lettres et adresses de tous les départements, dont on vous y fera la lecture, vous instruiront de l'opinion, des vœux et des besoins de tous vos commettants, de la manière la plus complète.

Après avoir décrété le matin les lois qui vous auront paru nécessaires au bonheur de la France entière, vous conférerez le soir avec tous les Français sur les lois à décréter encore pour compléter ce bonheur général; et je ne crois pas, Messieurs, qu'il puisse exister pour nous une société patriotique plus intéressante que celle ouverte ainsi à la France entière et présidée par ses représentants.

Tel est en général, Messieurs, l'ordre de nos travaux qui me paraît le plus complètement capable de rendre la permanence du Corps législatif la plus heureuse, la plus respectable et la plus utile des institutions sociales.

Voici mon projet de décret :

Projet de décret.

« L'Assemblée nationale, considérant qu'il ne peut y avoir de calme, de suite ni de maturité dans ses délibérations, tant que les objets et l'époque fixe pour les lui soumettre ne seront pas déterminés invariablement et remis par écrit à chacun de ses membres au moins un jour avant la discussion; considérant, en outre, que cet ordre ne peut être invariable qu'autant qu'aucun objet étranger ne pourra l'arrêter dans sa marche, décrète comme articles additionnels à sont règlement, ce qui suit :

« Art. 1er. Les comités auront incessamment chacun un registre, sur lequel ils inscriront, suivant que les matières leur paraîtront plus pressantes, la liste des rapports dont ils se trouvent respectivement chargés en ce moment; ils le continueront dans l'ordre des renvois quí, par la suite, leur seront faits chaque jour; et ce registre sera intitulé « Table des rapports du comité de... »

«Art. 2. Les rapports à faire en ce moment ainsi enregistrés dans tous les comités, leurs présidents se réuniront chaque jour au bureau avant l'ouverture de la séance et dresseront, avec le président de l'Assemblée, l'ordre du jour du surlendemain, d'après l'urgence et les époques d'ajournement des matières.

Art. 3. Les membres qui auront des projets particuliers à proposer, ne pourront les présen

ter à l'Assemblée qu'autant qu'ils se seront fait comprendre dans l'ordre du jour.

«Art. 4. L'annonce de chaque objet contiendra le nom du rapporteur et le tableau arrêté sera signé du président de l'Assemblée, d'un secrétaire et des 3 présidents d'âge des comités.

« Art. 5. Le tableau, en cet état, sera sur-lechamp envoyé à l'impression pour être joint, s'il est possible, à la distribution du jour, ou à celle du soir, ou au plus tard à celle du lendemain, de manière à donner à tous les membres la connaissance fixe de chaque ordre du jour, au moins 48 heures avant la discussion.

Art. 6. A l'égard des projets ajournés au lendemain comme ils ne pourront faire partie du tableau, le décret d'ajournement sera terminé par ces mots pour en faire le rapport à l'ordre du jour.

Art. 7. Aucunes pétitions, lettres ou adresses des citoyens et corps administratifs, aucun compte du propre mouvement des ministres et autres agents du pouvoir exécutif en un mot, aucun écrit de quelque part que ce soit, qui se trouverait étranger à l'ordre du jour, ne pourra désormais être lu à l'Assemblée, comme aucun pétitionnaire être entendu à la barre, qu'à des séances tenues les soirs, en tant que de besoin, par le Corps législatif et consacrées à ces seuls objets.

"Art. 8. L'Assemblée nationale excepte des dispositions du précédent article, les dépêches tellement urgentes, qu'il serait préjudiciable à la chose publique de différer jusqu'à l'ouverture de la séance du soir pour s'en occuper. Si lexposé sommaire de l'objet prouve cette vérité à l'Assemblée, elle ordonnera sur-le-champ la suspension de l'ordre du jour et la lecture des dépêches.

Art. 9. Aucune discussion ne pourra s'ouvrir, aucune demande en impression, insertion ou mention ne pourra être faite, relativement à ces esprits, que sur les rapports des comités chargés de les examiner. En conséquence, aucun des membres, excepté le président, ne pourra parler aux séances du soir, si ce n'est pour proposer et motiver le renvoi des objets aux comités correspondants.

«Art. 10. C'est à ces séances du soir seules que les membres useront du droit à eux accordé par le règlement, de faire lecture à l'Assemblée des pétitions ou autres écrits qui leur auront été adressés; mais il n'en sera délibéré, ainsi qu'il est voulu par l'article précédent, que pour en diriger le renvoi le plus convenable.

« Art. 11. Le président annoncera chaque jour, avant la fin de la séance du matin, s'il y a lieu ou non à la séance du soir, et ce, d'après les demandes des ministres, ou celles qui lui auront été adressées par écrit de toute autre part.

« Art. 12. L'ordre de ces séances aura pour base le principe incontestable, que ce qui est de l'intérêt le plus général, doit être le premier objet des sollicitudes du Corps législatif. Tels sont les rapports des ministres et autres agents du pouvoir exécutif; ensuite, ceux des administrations de département, de district, de municipalités, et enfin, les simples pétitions et adresses individuelles.

»Art. 13. Il y aura désormais sur le bureau un registre constamment ouvert, pour tenir état de tout ce qui sera présenté au Corps législatif, de quelque part et de quelque nature que ce soit. Chaque page de ce registre sera divisée en trois colonnes, ayant pour titres la première, sommaire des objets; la seconde, renvois aux comi

tés et la troisième, dates des décisions. Les enregistrements de la première colonne se suivront par ordre de numéros, lesquels seront exactement répétés sur les pièces relatives à chaque article du registre.

« Art. 14. L'Assemblée nationale révoque, par le présent décret, celui en vertu duquel elle avait consacré ses séances des dimanches matins aux pétitionnaires. >>

(L'Assemblée ordonne l'impression du rapport et du projet de décret de M. Deliars et le renvoi aux commissaires inspecteurs de la salle, pour en faire leur rapport sous 8 jours.)

M. Lasource, secrétaire. Voici une lettre de M. Cahier de Gerville, ministre de l'intérieur, relativement au décret que vous avez rendu sur le tribunal criminel de Paris (1).

Je crois pouvoir supprimer cette lettre, la meilleure réponse est d'envoyer le décret à la sanction. (Oui! oui!)

M. Lasource, secrétaire, fait lecture d'une lettre de M. Bertrand, ministre de la marine, à laquelle étaient jointes différentes pièces adressées de Cayenne, relativement au refus qu'on a fait d'admettre la corvette de l'Etat « la Perdrix », qui y était arrivée le 26 août dernier. Cette lettre est ainsi conçue :

« Monsieur le Président,

«Il vient de me parvenir plusieurs pièces de Cayenne, relativement au refus qu'on a fait d'admettre la corvette de l'Etat la Perdrix qui était arrivée le 26 août dernier, venant de la Martinique. Comme je suis informé que l'Assemblée nationale a reçu des détails semblables sur cette nouvelle entreprise des pouvoirs administratifs de la colonie, je me contenterai de joindre ici copie tant de la lettre que l'assemblée coloniale m'a remise à ce sujet, le 31 août dernier,'que du décret qu'elle a rendu le 16 septembre suivant, par suite des craintes que cette corvette avait inspirées.

L'Assemblée nationale verra, par ces pièces, que l'assemblée coloniale paraît être dans l'intention de ne pas laisser débarquer les troupes qui pourront accompagner les commissaires du roi, et qu'elle a arrêté que tout paquet ministériel serait ouvert par le commandant en chef en présence du comité et de deux députés, pour lui être ensuite communiqué, et être rendu public, s'il est jugé nécessaire. Je ne me permettrai aucune réflexion sur ces dispositions; mais il me semble que je ne saurais, aujourd'hui, faire partir les commissaires du roi, qu'au préalable l'Assemblée nationale n'ait fait connaître ses intentions sur le parti qu'il y aurait à prendre en cas de refus de laisser débarquer les troupes. Je vous prie, Monsieur le Président, de vouloir bien inviter l'Assemblée à prendre cet objet en considération, et à s'en occuper le plus promptement possible, attendu que le départ des commissaires devient tous les jours plus instant.

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Il paraît que le pouvoir exécutif se trouve réduit, dans la colonie, à la nullité la plus absolue, et qu'il est impossible qu'il puisse répondre de la moindre chose, si on ne lui rend l'énergie qu'il a perdue. Agréez que je vous rappelle à ce sujet, une lettre du 3 novembre dernier à laquelle

(1) Voy. ci-dessus, séance du samedi 7 janvier 1792, au matin, page 116.

je n'ai point eu de réponse; il serait à désirer qu'avant le départ des commissaires du roi, l'Assemblée nationale voulût bien faire rendré compte des pétitions qui lui ont été adressées en différentes circonstances au sujet des troubles qui agitent la colonie de Cayenne, pour que Sa Majesté fût plus en état d'indiquer dans les instructions qu'elle se propose de donner à ses commissaires, la marche qu'ils devront suivre pour rétablir le calme et la paix dans cette colonie. « Je suis avec respect, etc.

Signé BERTRAND. »

M. Masuyer. Je demande le renvoi de toutes ces pièces au comité colonial et je prie l'Assemblée de fixer enfin un jour pour entendre_la suite du rapport sur les troubles de Saint-Domingue.

M. Tarbé. J'appuie cette motion; ce rapport est prêt; j'offre de le faire mercredi prochain; l'Assemblée peut pareillement indiquer un jour pour entendre le rapport sur les troubles de Cayenne qui est prêt également.

(L'Assemblée renvoie la lettre du ministre de la marine et les pièces y jointes au comité colonial et ajourne à mercredi la suite de la discussion sur les colonies.)

M. Hérault-de-Séchelles. Je demande à faire une motion d'intérêt public sur un fait essentiel.

La circonstance urgente où nous sommes exige que l'Assemblée nationale interroge le ministre des affaires étrangères, pour savoir de lui si, depuis le décret d'accusation porté contre les princes, il a demandé à l'empereur, jusqu'ici notre allié, que la cocarde blanche fût défendue dans les Pays-Bas. C'est le devoir d'un allié de proscrire, à la première réquisition, ce signe de la rébellion des Français qui le portent, et dont la nation ne peut souffrir l'existence dans une contrée aussi voisine. Si cette cocarde subsiste encore en Brabant, n'en accusons que la lenteur des agents de notre pouvoir exécutif. Telle est notre position unique dans l'histoire, qu'en même temps qu'il faut nous présenter aux nations étrangères dans l'attitude convenable, nous sommes condamnés à faire marcher un pouvoir exécutif, que nous devons sauver de sa ruine en le sauvant de sa faiblesse. (Quelques applaudissements.)

Plusieurs membres : L'ordre du jour!

M. Hérault-de-Séchelles. De cette faiblesse que, dans les pays étrangers, on prend pour la nôtre; disons-le hautement, notre patience étonne l'Allemagne elle-même. Croyez, Messieurs, que Léopold est trompé; c'est à votre énergie dé lui ouvrir les yeux, de le soustraire à ce système d'illusions dont l'environnent des intrigants, des intrigants français. L'empereur, placé trop loin de la vérité, comme tous les monarques, est porté comme eux, par ses habitudes, à déférer aux opinions fantastiques de cette caste qui se trouve entre le peuple et lui, et qui prend aux émigrés un intérêt qu'elle regarde comme l'intérêt de tous les privilégiés de l'Europe. Montrons-lui en opposition à cette caste une nation, et Léopold verra que l'alliance de cette nation vaut mieux pour lui que les éloges de cette caste. Il renoncera aux vaines complaisances qu'il a pour elle; déjà la nécessité d'affecter une apparence d'intérêt pour ses sollicitations, lui pèse et le fatigue. Il s'étonne, sans doute, que la France ne le dé

livre pas de ce rôle gênant et forcé. Oui, Messieurs, je vous le prédis, un très court intervalle de temps doit convertir en certitude la probabilité que je vous présente, et j'ose ici garantir l'effet de ma promesse. Dans tous les cas, si Léopold ne sait pas ce que son intérêt lui ordonne, Vous aurez fait ce que vous ordonne l'honneur de la nation française. (Applaudissements.)

Je fais la motion que le ministre des affaires étrangères soit mandé à l'instant, pour savoir de lui s'il a requis Sa Majesté impériale de défendre la cocarde blanche dans les Pays-Bas autrichiens.

Plusieurs membres : Appuyé! appuyé!

Voix diverses: Le renvoi au comité diplomatique! L'ordre du jour!

M. Goujon. Il n'est pas possible de passer à l'ordre du jour sur une pareille motion; mais il convient de l'ajourner et de la renvoyer au comité diplomatique avec toutes les mesures ajournées à la suite du rapport sur les propositions du ministre de la guerre; c'est à quoi je conclus.

Plusieurs membres : La question préalable sur le renvoi!

M. Audrein et plusieurs autres membres. Aux voix la motion de M. Hérault !

M. Ramond. Certes, Messieurs, si votre comité diplomatique, qui doit vous faire un rapport sur l'office de l'empereur et sur tous ses accessoires, se bornait à demander au ministre des affaires étrangères, ou à vous proposer de lui demander s'il a pris des mesures relativement aux cocardes blanches d'un plus ou moins grand diamètre, certes, dis-je, votre comité diplomatique ne se croirait pas digne de votre confiance. J'ose vous assurer que, dans son rapport, qui est très prochain, il vous proposera des mesures d'une plus vaste étendue et qui comprendront certainement les cocardes blanches. Je demande donc que l'Assemblée passe à l'ordre du jour sur la motion de M. Hérault. (Vifs applaudissements.) Plusieurs membres : L'ordre du jour!

M. Taillefer. Je demande que le rapport du comité diplomatique soit ajourné à jour fixe.

M. Deperet. Je demande le renvoi au comité diplomatique car, quoi qu'en dise M. Ramond, ce n'est point la grandeur des cocardes blanches qui doit occuper l'attention de l'Assemblée, mais le signe de rebellion qu'elle offre aux ennemis français.

Plusieurs membres : L'ordre du jour!

(L'Assemblée, consultée, passe à l'ordre du jour sur la motion de M. Hérault.)

M. le Président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion sur la question de savoir si les décrets relatifs, à l'organisation de la haute cour nationale sont sujets à la sanction du roi. (Voy. p. 176.)

Un membre demande la priorité pour la discussion du projet de décret des comités des finances et des secours publics sur les moyens provisoires à employer pour subvenir aux besoins des départements qui, par des cas particuliers et extraordinaires, peuvent exiger des secours.

(Cette priorité, mise aux voix, est décrétée.)

M. Deperet, au nom des comités de l'ordinaire et de l'extraordinaire des finances et des secours publics, soumet en conséquence à la discussion

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