Page images
PDF
EPUB

nellement que dans un interrègne, le conseil du roi était autorisé à faire des proclamations et autres actes d'administration. Si quelques nouveaux ministres, nommés par un roi séduit, veulent s'emparer de l'administration, nous les ferons poursuivre criminellement.

M. Desmeuniers. Si l'on craint que les factieux qui ont séduit le roi le déterminent à nommer de nouveaux ministres, vous pouvez déclarer formellement que vous concentrez le pouvoir exécutif, sauf le pouvoir de la sanction, dans les ministres actuels.

M. Charles Lameth. Je pense que la proposition de M. Custine est extrêmement utile; mais je pense qu'elle est mal rédigée. Je crois aussi que cette mesure ne pourra être adoptée que quand nous saurons à quoi nous en tenir sur la fuite du roi, quand nous saurons s'il est dans le royaume, ou s'il se prépare à des dispositions hostiles contre la constitution qui l'a fait roi. Je demande donc que la motion prématurée de M. Custine soit renvoyée au comité de constitution.

L'assemblée ordonne le renvoi au comité.

M. Fréteau. Je suis chargé par votre comité diplomatique de vous proposer d'ordonner à la municipalité de Paris de mettre le scellé sur les archives des affaires étrangères, et sur les chiffres qu'elles renferment. Si l'on pense qu'une partie de ces chiffres est indispensable pour la connaissance des dépêches qui arrivent journellement des cours étrangères, on peut décréter que lorsque les scellés seront mis, rien ne sortira de ces dépôts que sur la signature du ministre des affaires étrangères, et sur sa responsabilité.

La proposition de M. Fréteau est adoptée.

M. Raderer. Je demande que la lettre trouvée dans l'appartement de la reine soit renvoyée au département.

Plusieurs membres demandent le renvoi au comité des recherches.

Cette dernière proposition est adoptée.

MM. Montmorin, ministre des affaires étrangères, et d'Affri,

commandant-général des Suisses, sont admis, le premier, au sein de l'assemblée, le second, à la barre.

M. Montmorin proteste de son dévoûment et de sa soumission aux ordres du corps constituant.

M. Charles Lameth. Je pense qu'il serait bon d'ordonner que le ministre des affaires étrangères se réunît au comité diplomatique, afin de préparer les grands moyens de résistance que les circonstances pourront rendre nécessaires.

Cette proposition est adoptée.

M. d'Affri, accompagné de cinq à six officiers de l'état-major, prononce quelques paroles que la faiblesse de son organe émpêche de recueillir.

[ocr errors]

M. le président. M. d'Affri, que son grand âge empêche de se faire entendre, vient d'exprimer sa fidélité à l'assemblée nationale, et de protester qu'il n'obeira qu'à ses ordres; qu'il se regarde non comme étranger, mais comme officier français, et qu'il se fera un devoir de mourir pour sa patrie.

(L'assemblée applaudit à plusieurs reprises.)

Il demande aussi la permission de se faire remplacer par ceux qui lui succèdent dans la hiérarchie militaire.

(L'assemblée applaudit en signe d'adhésion.)

M. Leboisdaiguier. M. le président a oublié de vous dire que M. d'Affri, dans le peu de mots qu'il vous a adressés, avait aussi protesté de la fidélité de son état-major, sur le patriotisme duquel on peut compter. (On applaudit.)

M. Regnaud, député de Saint-Jean-d'Angely. Vous savez que M. Duverrier a été chargé par le roi de notifier à M. Condé le décret qui le concerne; peut-être jugerez-vous bon, pour sa sûreté, de lui faire expédier un passeport signé du président de l'assemblée nationale.

Cette proposition est adoptée.

M. Rewbell. Vous avez décrété que la caisse de l'extraordinaire verserait une somme de vingt-huit millions dans le trésor public. Quoique ce décret ne soit pas sanctionné, je demande qu'il soit

exécuté; il ne faut aucun retard ni dans les recouvremens, ni

dans les paiemens.

M. Desmeuniers. Nous avons pourvu à la proposition de M. Rewbell par la disposition insérée dans le décret que vous venez de rendre. Il est ainsi conçu: « L'assemblée constituante ordonne que les décrets rendus ou à rendre, non sanctionnés par le roi, à raison de son absence, auront néanmoins provisoirement force de loi dans toute l'étendue du royaume. ›

Cette dernière rédaction est adoptée.

M. Barnave. Il est important que les décrets que vous avez rendus, reçoivent une rédaction parfaite ainsi il pourrait être bon que l'assemblée autorisât son président à nommer six commissaires qui, réunis aux secrétaires de l'assemblée, perfectionneront les rédactions, placeront les décrets dans leur ordre, et en feront à l'assemblée une lecture definitive.

M. Fré ean. Il est bien entendu que les décrets qui sont déjà expédiés sont bons, quelques changemens de rédaction qui pourraient y être faits.

L'assemblée adopte la proposition de M. Barnave.

M. Charles Lameth. Je demande que, dans le cas où l'absence du roi prendrait de la consistance, le comité de constitution nous présente un projet de proclamation à tous les départemens, afin de leur recommander l'ordre, la protection des propriétés et des travaux de l'agriculture, et de les exhorter à veilier à ce que tous les citoyens fassent également le service de gardes nationales: ainsi les mauvais citoyens seront retenus par les bons.

La proposition de M. Charles Lameth est adoptée.

M. Regnaud, député de Saint-Jean-d'Angely. Il est nécessaire de savoir en quel état sont, dans ce moment, vos différentes caisses je propose donc de décréter que les commnissaires de la trésorerie nationale s'y rendront pour consta er ce qui s'y trouve.

Cette proposition est adoptée.

M. le président. Il paraît que personne n'a plus à faire aucune proposition relative aux circonstances. L'assemblée jugera peut

être bon jusqu'à ce que ses comités soient prêts à rendre compte des divers objets qui leur ont été renvoyés, de passer à l'ordre du jour.

L'assemblée passe à l'ordre du jour.

M. Latour-Maubourg. Conformément à vos ordres, nous avons été délivrer les deux aides-de-camp qui avaient été arrêtés, et nous les avons conduits jusqu'à la porte Saint-Martin. Sur notre route, nous n'avons remarqué dans le peuple que le désir de l'ordre, et nous n'avons entendu que des bénédictions pour l'assemblée nationale qui détruira tous les complots.

M. Dandré. Je propose à l'assemblée nationale de décider qu'elle ne levera sa séance que par un décret exprès. Cette proposition est adoptée.

M. Laporte paraît à la barre.

M. le président lui notifie les intentions de l'assemblée nationale.

M. Laporte. J'ai reçu à huit heures du matin, par un domestique du premier valet de chambre du roi, un paquet contenant un billet du roi, et un mémoire assez long, dont je n'ai lu que la première et la dernière page. Je me suis aussitôt rendu chez M. le garde du sceau pour lui en faire part, et ensuite chez M. le président de l'assemblée nationale, que je n'ai point trouvé.

M. Regnaud, député de Saint-Jean-d'Angely. Je propose une mesure préliminaire: je demande que M. Laporte écrive et signe le peu de mots qu'il vient de prononcer.

M. Defermont. Je demande que l'assemblée ordonne le renvoi du billet et du mémoire à ses comités des recherches et des rapports.

Plusieurs membres demandent qu'il soit fait sur-le-champ lecture du mémoire.

M. Charles Lameth. Le mémoire n'est point cacheté; le patriotisme de M. Laporte l'a déterminé à vous en donner connaissance: il peut contenir des choses très-importantes : je demande qu'il en soit fait lecture.

M. Laporte remet le mémoire à M. le président.
Un de MM. les secrétaires en fait lecture.

Proclamation du roi à tous les Français, à sa sortie de Paris.

Un membre demande le renvoi au comité des recherches,
Toute la partie gauche se lève contre cette proposition.
M. le secrétaire continue.

Extrait de la proclamation.

Lorsque le roi a pu espérer de voir renaître l'ordre et le bonheur par les moyens employés par l'assemblée nationale et par sa résidence auprès de cette assemblée, aucun sacrifice ne lui a coûté; il n'aurait pas même argué du défaut de liberté, dont il est privé depuis le mois d'octobre 1789; mais aujourd'hui que le résultat de toutes les opérations est de voir la royauté détruite, les propriétés violées, la sûreté des personnes compromise, une anarchie complète dans toutes les parties de l'empire, sans aucune apparence d'autorité suffisante pour l'arrêter, le roi, après avoir protesté contre tous les actes émanés de lui pendant sa captivité, croit devoir mettre sous les yeux des Français, le tableau de sa conduite.

Au mois de juillet 1789, le roi, sûr de sa conscience, n'a pas craint de venir parmi les Parisiens. Au mois d'octobre de la même année, prévenu des mouvemens des factieux, il a craint qu'on arguât de son départ pour fomenter la guerre civile. Tout le monde est instruit de l'impunité des crimes qui se commirent alors. Le roi, cédant au vou manifesté par l'armée des Parisiens, vint s'établir avec sa famille au château des Tuileries. Rien n'était prêt pour le recevoir; et le roi, bien loin de trouver les commodités auxquelles il était accoutumé dans ses autres demeures, n'y a pas même rencontré les agrémens que se procurent les personnes aisées. Malgré toutes les contraintes, il a cru devoir dès le lendemain de son arrivée, rassurer les provinces sur son séjour à Paris. Un sacrifice plus pénible lui était réservé : il a fallu qu'il éloignât de lui ses gardes-du-corps, dont il avait éprouvé la fidélité. Deux ont été massacrés, plusieurs ont été

« PreviousContinue »